Après la tentative de suicide d’un étudiant devant le CROUS de Lyon vendredi 8 novembre, plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblées devant l’antenne de Lille à l’appel du syndicat Solidaires. Le cortège s’est ensuite dirigé vers l’Université de Lille 2, provoquant l’annulation d’une conférence de François Hollande.

«  Depuis 20 ans, nous voyons les conditions de travail de nos élèves se dégrader  », explique un professeur de l’université de Lille 2. Un sentiment partagé par les responsables lillois du syndicat Solidaires qui ont rendu hommage à l’étudiant qui s’est immolé à Lyon, devant une centaine d’étudiants, responsables syndicaux et professeurs. Plusieurs autres syndicats étaient présents, à l’instar de Sud, le Snesup, l’Unef ou la CGT. Revendiquant un acte politique, le jeune homme a expliqué son geste par son extrême précarité liée à la suppression de ses bourses, après son redoublement. En effet, le coût de la vie étudiante a encore augmenté cette année (+2,83%), selon un rapport de l’Unef publié le 16 août. Dans certaines villes, les loyers ont flambé  : +11,07% à Bordeaux, +5,18% à Paris. Et le montant des bourses ne suffit pas toujours à compenser. Solidaires a appelé à la création d’un revenu étudiant pour pallier à ce faible pouvoir d’achat. Le syndicat a aussi dénoncé les conditions d’hébergement des étudiants dans les logements CROUS, souvent vétustes. Ceux-ci ne sont d’ailleurs pas soumis à la trêve hivernale.

 

«  Il faut attendre qu’il y ait un geste aussi dramatique pour qu’on ait une parole  »

Face à cette précarité croissante, beaucoup d’étudiants présents cette après-midi se disent particulièrement choqués. «  Il y a quand même un étudiant qui a tenté de se suicider parce qu’il avait plus de thunes, c’est pas normal  ! s’insurge Justine, 18 ans. On peut le dire, la précarité ça tue  ». Pour les syndicats et les manifestants présents, l’Etat est responsable de la situation qui a conduit au geste dramatique de l’étudiant de Lyon. Sur Twitter, Solidaires a dénoncé une «  violence trop commune que l’Etat et l’Université exercent contre les étudiants  ». Et pour cause, le gouvernement actuel n’a pas brillé par sa sensibilité au problème lorsqu’il a réduit les APL de 5 euros. Les manifestants ont aussi reproché le silence assourdissant de la direction de l’université de Lille sur le sujet. Thomas, du syndicat Sud, s’est dit «  sidéré  » qu’il n’y ait pas eu le moindre mot de condoléances. De façon générale, les militants ont dénoncé les coupes dans les budgets des universités et des aides sociales, ainsi que la gestion néolibérale des institutions publiques. «  On n’est pas écoutés, il faut attendre qu’il y ait un geste aussi dramatique pour qu’on ait une parole  », dénonce une syndicaliste de Solidaires. Dans son post Facebook, l’étudiant de l’université de Lyon 2 avait mis en cause nommément Nicolas Sarkozy, François Hollande et le président Emmanuel Macron.

Témoignage de Chloé, amie de la victime.

Ironie du sort, François Hollande était justement invité à discourir des réponses à apporter à la «  crise démocratique  » l’après-midi même. Alors que les manifestants s’apprêtaient à envahir l’amphithéâtre, l’ancien chef de l’Etat a annulé son allocution. Mécontents de se voir privés de conférence, certains étudiants ont fait remarquer, de façon particulièrement cynique, que le jeune stéphanois «  n’avait qu’à pas redoubler  » s’il voulait conserver ses bourses. C’est mépriser le fait que tous les étudiants n’ont pas les mêmes chances de réussite, quand un étudiant sur deux est obligé de travailler pour payer ses études. Jérôme, professeur à l’université et syndiqué snesup, confie ses inquiétudes sur le fait le travail des étudiants prime aujourd’hui de plus en plus sur leurs études. «  On se dit que la prochaine fois, ça pourrait être nos élèves ».

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